Keiko vit dans les faubourgs de Tokyo où elle s’entraîne avec acharnement à la boxe. Sourde, c’est avec son corps qu’elle s’exprime. Mais au moment où sa carrière prend son envol, elle décide de tout arrêter…
Shô MIYAKE est un jeune cinéaste japonais qui commence doucement à se faire un nom dans les festivals internationaux. Son premier long métrage, Playback, avait fait sensation au Japon lors de sa sortie, lui faisant remporter des prix en festival, ainsi qu’une sélection au festival international de Locarno. Après avoir réalisé la série Ju-On Origins pour la plateforme Netflix, directement adaptée du classique The Grudge, il réalise La beauté du geste, présenté lors de la Berlinale 2022.
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TROUVER SA PLACE AU JAPON
Le film se démarque par sa mise en scène, très géométrique et épurée, mettant l’accent sur la rigidité du quotidien. Ce choix a pour objectif de mieux offrir une porte de sortie à son personnage principal qui, lorsqu’elle monte sur le ring, a la possibilité de trouver sa place. N’arrivant pas à s’intégrer ou à s’ouvrir aux autres, c’est grâce à la boxe que Keiko trouve les ressources pour bouger et se sentir elle-même.
Simple employée de surface dans un hôtel, Keiko rencontre des difficultés à s’exprimer, que ce soit auprès de ses collègues ou de sa famille. L’action se déroulant durant l’épidémie de COVID-19, le réalisateur utilise les contraintes liées au confinement pour en faire une force. Les masques deviennent une barrière physique qui empêche Keiko de pleinement s’exprimer. Contrainte d’enlever son masque pour qu’on l’identifie, c’est sur le ring qu’elle arrive à être pleinement perceptible à la lumière. Enfin, le confinement offre au réalisateur la possibilité d’exploiter l’immensité de Tokyo. La solitude de Keiko se retrouve représentée par le vide ambiant et le silence, l’isolant du reste du monde.
ÊTRE À L’ÉCOUTE DE CEUX QUI NE PEUVENT ENTENDRE
À travers un jeu de montage, le réalisateur met en avant la vie. On peut le voir à travers la scène présentant le club de boxe, où tous les membres du club semblent synchronisés. On peut voir l’esprit du club battant le même rythme, comme une seule personne. Il faut alors se poser pour prendre le temps de prêter attention à ces éléments paraissant minimes, mais qui représentent beaucoup pour Keiko.
Le réalisateur met en avant la beauté du monde lorsque celui-ci n’est plus contraint par des éléments extérieurs de la société. C’est dans cette optique que Shô MIYAKE propose des plans contemplatifs, permettant de profiter du calme. Cela peut être compliqué de pleinement rentrer dans le rythme du film, car il est assez lent. Cependant, lorsque l’on accepte de lâcher prise, on est porté par la poésie ambiante. La beauté du geste devient alors un film mettant en scène l’écoute de l’implicite plutôt que l’incapacité à écouter.
La beauté du geste touche en plein cœur par sa tendresse et sa délicatesse, proposant un moment de méditation plein de poésie. À travers le portrait de cette boxeuse sourde, Shô Miyake fait parler le silence et dévoile une sensibilité remarquable.
TITRE ORIGINAL : Keiko, me wo sumasete
GENRE : Drame
TECHNIQUE : Prise de vues réelles
DURÉE : 1h39
PAYS : Japon
DATE DE SORTIE FR : 30 août 2023
RÉALISATION : Shô Miyake
AVEC : Yukino Kishii, Tomokazu Miura, Masaki Miura
PRODUCTION : The fool
DISTRIBUTEUR FR : Art House films