Love Life : De quoi la vie sera faite ?

Taeko vit avec son époux Jiro et son fils Keita en face de chez ses beaux-parents. Tandis qu’elle découvre l’existence d’une ancienne fiancée de son mari, le père biologique de Keita refait surface. C’est le début d’un cruel jeu de chaises musicales, dont personne ne sortira indemne.

Après L’Infirmière, Suis-moi, je te fuis et Fuis-moi, je te suis, le cinéaste japonais, Kôji FUKADA nous partage une œuvre toute aussi brillante, Love Life. Inspiré par le titre éponyme de 1991, Love Life de Akiko YANO, le cinéaste a réussi à construire une histoire poignante, dure, mais avant tout humaine, sur l’acceptation de la solitude. D’une beauté, sans pareille et pensée depuis 20 ans, Kôji FUKADA nous livre ce qui est probablement son plus beau long-métrage.

La vie, c’est comme un pion d’Othello

Avec Love Life, le cinéaste nous fait pénétrer dans le quotidien d’une jeune famille. Celle de Taeko, son époux Jiro et son fils Keita, issu de la précédente union de Taeko avec un ressortissant coréen. Bien que tout puisse sembler banal dans ce cocon familial tapissé d’amours et de souvenirs, ou le joyeux Keita enchaîne victoires nationales d’Othello. Seul ombre au tableau, les beaux-parents de Jiro qui ont beaucoup de mal à vivre cette relation. Nous pouvons également évoquer, parmi ces points sombres, la présence de Yamazaki, l’ex de Jiro, rentrant malgré elle de plus en plus dans la vie du jeune couple, au même titre que la réapparition de Park, le père biologique de Keita.

Cependant, comme un pion d’Othello qu’il est impossible de retourner, une fête d’anniversaire va faire vaciller tout ce cocon familial. À partir de cet instant, le film prend une tournure radicalement différente ou la douleur et les regrets de chacun des personnages font écho aux paroles du titre d’Akiko YANO apparaissant deux fois à des moments forts du film : « Quelle que soit la distance qui nous sépare, rien ne peut m’empêcher de t’aimer ». Des paroles fortes, en concordante émotionnelle et scénaristique avec l’œuvre de Kôji FUKADA. Des paroles fortes qui ne peuvent nous empêcher de ressentir une profonde empathie pour l’ensemble des personnages.

Love Life
Love Life, un film de Kôji Fukada.

Loin d’uN Japon carte postale

À mille lieux du Japon version carte postale que nous avons l’habitude de voir, Lofe Life nous présente des personnages que nous pourrions qualifier d’égoïstes aux yeux des Japonais. Pourtant, Kôji FUKADA capture pourtant avec son film l’image d’une société japonaise actuelle encore patriarcale, où l’homme et les seniors ne peuvent cacher leurs émotions. Que ce soit sous forme de pression sociale ou familiale.

Peu après ce drame inattendu, le monde s’effondre pour nos personnages, qui doivent répondre à l’appel de la solitude et l’accepter. Cependant, c’est sans compter sur les défis de la vie que la petite famille va devoir endurer. Notamment le retour de Park, le père biologique de Keita, qui a abandonné sa femme et son fils quelques années auparavant. Faible, sourd et désormais sans domicile fixe, Park revient dans la vie de Taeko pour lui demander de l’aide pour régulariser sa situation auprès de l’administration. Taeko étant la seule à pouvoir communiquer avec Park à travers la langue des signes coréenne. De son côté, Jiro voit son amour de lycée, Yamazaki, lui exprimer ses sentiments et ses regrets. Entre empathie et sentiments, impossible de savoir comment la vie va-t-elle tourner et jusqu’où le couple est prêt à aller, pour aller de l’avant.


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Love Life

Love Life est probablement le plus beau film de Kôji FUKADA. Jonglant entre douceur et dureté de la vie, le tout avec une réalisation épurée, soignée et intimiste. À l’image de la vie, le film nous offre des moments de tendresses, de tristesses, et certains d’une dureté particulièrement forte, notamment à partir l’élément déclencheur.

En sa qualité de réalisateur, Kôji FUKADA nous montre avec brio la manière dont il souhaite que le spectateur perçoive la vie de ses protagonistes. Chaque plan est pensé de manière à ne pas devenir un troisième personnage, mais comme si nous n’étions qu’un tout plongé dans l’intimité de ce cocon familial fracturé. Intimiste, mais pas intrusif, FUKADA nous laisse également le répit d’admirer les ambiances du quartier, presque à la manière d’un certain Hideaki ANNO ou d’un Nichijô.

Avec un montage soigné, volontairement lent et constant, Love Life nous arrive à nous toucher en plein cœur à travers son scénario et sa narration unique, porté par des comédiens brillants et une mise en scène soignée jusqu’au moindre détail, nécessitant même un second visionnage pour en saisir toutes les subtilités. On notera notamment le personnage de Park, interprété par Atom SUNADA qui est réellement sourd. Ou bien encore, la symbolique portée par le plateau d’Othello et le titre Love Life d’Akiko YANO. Chaque élément est sujet à des références et symboliques fortes, au service de la narration et de la psychologie des personnages. Faisant ainsi de Love Life, un mélodrame inclassable.

Avec Love Life, Kôji FUKADA nous offre un film magnifique, d’une beauté fragile comme la vie. Pensé depuis plus de 20 ans et inspiré par le titre éponyme d’Akiko YANO, le cinéaste saisit les toutes les nuances de la vie pour en faire un plateau d’Othello où il est impossible de rejouer. Love Life, c’est cette quête d’acceptation de cette solitude qui nous permet d’aller de l’avant, porté par une mise en scène intimiste, soignée et des personnages profondément humains, mais égoïstes. Un film doux-amer, concluant sur une magnifique séquence de finale, probablement l’une des plus belles et symboliques de tout le cinéma japonais à nos yeux.

TITRE ORIGINAL : Love Life
GENRE : Drame
TECHNIQUE : Prise de vues réelles
DURÉE : 2h04
PAYS : Japon, France
DATE DE SORTIE FR : 14 juin 2023
RÉALISATION : Kôji Fukada
AVEC : Fumino Kimura, Tomorowo Taguchi et Tetta Shimada
PRODUCTION : Nagoya Broadcasting Network, Chipangu et Comme des Cinémas
DISTRIBUTEUR FR : Art House Films
©2022 LOVE LIFE FILM PARTNERS & COMME DES CINEMAS

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