Los Delincuentes : Le casse de toute une vie

Román et Morán, deux modestes employés de banque de Buenos Aires, sont piégés par la routine. Morán met en œuvre un projet fou : voler au coffre une somme équivalente à leurs vies de salaires. Désormais délinquants, leurs destins sont liés. Au gré de leur cavale et des rencontres, chacun à sa manière emprunte une voie nouvelle vers la liberté.

Après Reimon (2014) et Provincial City (2017), le cinéaste Rodrigo Moreno est de retour avec son nouveau long-métrage, Los Delincuentes. La quête folle de deux hommes en recherche d’une liberté, malgré les enjeux et sacrifices qu’ils vont devoir faire face pour y parvenir.

3 ans de prison ou 20 ans à charbonner ?

Tel est l’enjeu principal de Los Delincuentes. L’histoire, découpée en deux chapitres s’étalant sur trois ans, nous conte la mésaventure de deux employés de banque : Román et Morán. Le film prend le temps de poser, en l’espace de quelques minutes, son contexte : une vie ennuyeuse dont Morán souhaite se détacher. Pour ce faire, il met en place son projet fou, voler l’équivalent d’une vie en salaire au coffre de la banque et se rendre aux autorités pour allonger sa peine à trois ans de prison. Mais pour garantir la sûreté du gain, il devra compter sur son collègue et ami, Román, qui possède une vie que tout oppose : marié et père de famille. Ainsi, la vie de nos deux antihéros va changer du tout au tout !

Une première partie sous conséquences

Comme mentionné plus haut, Los Delincuentes est un film en deux parties directes. La première va se concentrer sur le casse de Morán, et comment il va vivre sa courte liberté en solitaire avant de se rendre aux autorités. On va ainsi vivre ses trois ans d’emprisonnement à travers un subtil jeu de destin croisés avec la vie de Román, presque piégé dans cette affaire. Ingénieux, Rodrigo Moreno joue sur cet aspect de destins croisés avec brio ; que ce soit au niveau des compositions de cadres ou encore des liens sociaux partagés par nos protagonistes. En bref, cette première partie se concentre sur la mise en pratique du plan et la protection de leur “trésor”, des conséquences dramatiques de ce casse dans le fonctionnement de la banque ; et de surcroît, la suspicion de la participation de Román dans cette affaire, qui va radicalement changer sa vie.

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Une deuxième partie centrée sur la vie

La seconde partie se concentre sur la vie de nos protagonistes post-casse. En effet, elle prend le temps de nous conter la courte liberté de Morán avant de se rendre. Alors qu’il cherche un logement en pleine campagne argentine, notre antihéros va commencer une longue relation avec la maîtresse de maison et faire partie intégrante de son quotidien. De son côté, Román change radicalement, en vivant une vie de “vagabond” après avoir rencontré une jeune femme au fin fond d’une forêt montagneuse. Mais c’est sans compter sur le lien de cette femme avec la vie de cavale de Morán…

Los Delincuentes est un thriller poignant

Au-delà de sa narration, la force du film se trouve dans la mise en scène, allant même jusqu’à nous rappeler Les Évadés de Frank Darabont, surtout dans sa deuxième partie. Rodrigo Moreno maîtrise ainsi le rythme de son œuvre, jusqu’aux moindres détails. Le cinéaste s’amuse également avec la temporalité du récit et des cadres sans jamais perdre le spectateur, et ce, malgré les trois heures de film, qui pourraient en rebuter certains, dans un premier temps. Évidemment, Los Delincuentes n’est pas exempt de défauts. Le film souffre de quelques longueurs pendant une petite quinzaine de minutes, tout au plus.

Il est par ailleurs impossible de passer à côté de l’interprétation fabuleuse de Daniel Elias et Esteban Bigliardi. Interprétant respectivement Morán et Román. À contrario des acteurs, on regrettera quand même une bande originale pas spécialement marquante. Mais malgré ça, Los Delincuentes est un thriller grandiose, mais pas que !

Bien plus qu’un simple thriller

Il serait mauvais de juger Los Delincuentes comme simple thriller de trois heures. Rodrigo Moreno nous livre une profonde réflexion sur notre perception de la vie et du sens du terme “liberté”. Impossible de ne pas se demander en fin de séance : Qu’est-ce que trois ans au trou en échange d’une vie entière de liberté ? Los Delincuentes fait partie de ces films enchanteurs, qui, par une certaine poésie dans la narration et la mise en scène, nous conte une critique sociale et sociétale sur notre façon d’appréhender la vie, notre liberté et les sacrifices qui en découlent.

Avec Los Delincuentes (lit. Les délinquants), Rodrigo Moreno nous offre trois heures de grand cinéma. Plus qu’un simple thriller, Los Delincuentes est une critique sociale et sociétale, presque poétique, néanmoins enchanteur, remettant en cause notre manière de voir la “liberté”. Porté par une réalisation soignée et une intrigue en deux parties, tel un roman, nul doute que la quête de Morán et Román ne laissera personne indifférent !