Chien Blanc : Une poignante nouvelle adaptation du roman de Romain Gary

1968 - États-Unis. Martin Luther King est assassiné et les haines raciales mettent le pays à feu et à sang. Romain Gary et sa femme, l’actrice Jean Seberg, qui vivent à Los Angeles, recueillent un chien égaré, dressé exclusivement pour attaquer les Noirs : un chien blanc. L'écrivain, amoureux des animaux, refuse de le faire euthanasier, au risque de mettre en péril sa relation avec Jean, militante pour les droits civiques et très active au sein des Black Panthers.

Après une première adaptation cinématographique signée Samuel Fuller en 1982 sous le nom Dressé pour tuer, le roman Chien Blanc de Romain Gary, revient sur le devant de la scène avec cette nouvelle adaptation canadienne à la fois poignante et brillante d’Anaïs Barbeau-Lavalette. Plus fidèle à l’œuvre originale, la cinéaste met en scène avec brio Denis Ménochet et (Inglourious Basterds, The French Dispatch) et Kacey Rohl (Hannibal, Arrow).

Une adaptation plus fidèle

Dès les premières minutes, Chien Blanc nous place dans son contexte à travers un premier plan à hauteur canin, qui fera office de fil rouge tout au long du film, à la même image que les textes de Romain Gary. 1968, Martin Luther King est assassiné, laissant derrière lui et ses rêves, un pays en proie aux guerres raciales et au déchirement du peuple. Le ton est lourd et brutal à l’image de la tension omniprésente dans le pays.

Comme le roman éponyme, Chien Blanc suit la violente épopée du célèbre couple Romain Gary et Jean Seberg en plein cœur du chaos de Los Angeles de 1968. Au cœur du film, un chien venu du sud. Celui de la discorde, un Chien Blanc, élevé pour attaquer les Noirs. Humaniste, on y suit Romain Gary dans une quête sociale et psychologique. Un Chien Blanc raciste ? Tuons-le, ce n’est qu’un chien. Mais dans ce cas, faut-il tuer tous les racistes, même humains ? Le récit de Romain Gary pose la question de l’humanité et questionne sur la manière de faire évoluer les mentalités, même lorsqu’on parle d’un chien qui a vécu dans la banalité d’un racisme inventé par des humains.


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Bien que le film porte un rythme lent et délicat, ce long-métrage n’en reste pas moins extrêmement puissant. Anaïs Barbeau-Lavalette retranscrit avec une fidélité poignante toute la violence de cette époque à travers une mise en scène et une narration soignée, bien que quelque peu académique par moments. Bien qu’on ait ici deux écoles aux tensions parfois palpables, au service du même idéal : Romain Gary et Keys (le dresseur afro-américain qui se donne pour lourd objectif de changer ce Chien Blanc en “Chien Noir”), le récit nous montre la différence entre être au cœur du combat Black Panthers et se l’approprier par mégarde, au risque de tout perdre au nom de nos principes humanistes.

Une réalisation académique mais juste

Sans être extrêmement marquante, la réalisation d’Anaïs Barbeau-Lavalette reste honorable. On apprécie surtout la beauté de photographie et des cadres signés Jonathan Decoste, et l’importance donnée aux dialogues, aux propos ainsi qu’à la dramaturgie générale du film. Chien Blanc ne se démarque peut-être pas par sa réalisation, mais on reste fasciné par le respect et la fidélité du film vis-à-vis de l’œuvre de Romain Gary et la manière dont est retranscrite cette époque sombre des États-Unis. On notera également l’utilisation d’images d’archives authentiques, rendant d’autant plus crédible ce récit percutant.

La force de Chien Blanc se trouve notamment dans le traitement des écrits de Romain Gary. Chaque moment clé du long-métrage est marqué par les textes de l’écrivain, le tout, magnifiquement mis en scène. Non par hasard, Anaïs Barbeau-Lavalette utilise avec justesse ces textes pour les mettre au service de sa mise en scène pour accentuer avec intelligence le contexte psychologique et social de nos personnages.

On notera, pour finir, la puissance du casting. Romain Gary est porté avec brio par un Denis Ménochet à la fois juste et exceptionnel, presque transcendant. De son côté, l’actrice Jean Seberg est interprétée avec justesse par Kacey Rohl, qui se révèle très convaincante, bien qu’un peu timide par moments, notamment lors des séquences de confrontation. K.C. Collins, qui interprète Keys est absolument poignant, et son jeu, aussi puissant que son aura à l’écran, en fait de lui, le protagoniste principal de l’histoire.

Avec Chien Blanc, Anaïs Barbeau-Lavalette signe une nouvelle adaptation plus fidèle du roman de Romain Gary. Poignant et puissant, ce film criant d’authenticité, nous plonge au cœur d’un Los Angeles en proie au chaos post-Luther King. Humaniste, politique et antiracisme, Chien Blanc est un film qui mérite d’être vu, grâce à son propos, son traitement historique, ou encore pour la puissance de son casting, malgré une réalisation soignée, mais quelque peu timide.

TITRE ORIGINAL : Chien Blanc
GENRE : Drame
TECHNIQUE : Prise de vues réelles
DURÉE : 1h36
PAYS : Canada
DATE DE SORTIE FR : 22 mai 2024
RÉALISATION : Anaïs Barbeau-Lavalette
D’APRÈS LE ROMAN DE : Romain Gary
AVEC : Denis Ménochet, Kacey Rohl et K.C. Collins
PRODUCTION : mk2, Mile End et Go Films
DISTRIBUTEUR FR : Destiny Films

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