Banlieue de Londres. Géorgie 12 ans vit seule depuis la mort de sa mère. Elle se débrouille au quotidien pour éloigner les travailleurs sociaux, raconte qu’elle vit avec un oncle, gagne de l’argent en faisant un trafic de vélo avec son ami Ali. Cet équilibre fonctionne jusqu’à l’arrivée de Jason, un jeune homme qu’elle ne connaît pas et se présente comme étant son père.
Après avoir réalisé de nombreux clips indépendants et trois courts-métrages à succès, la cinéaste londonienne, Charlotte Regan signe ici son premier long-métrage : Scrapper. Une mise en avant lumineuse de la classe ouvrière anglaise qui accompagne une vision originale du deuil, à hauteur d’enfant. Plus qu’un premier long-métrage, Scrapper dévoile, pour la première fois à l’écran, la jeune Lola Campbell, qui s’approprie avec brio le personnage de Géorgie. Un long-métrage qui nous rappelle, d’une manière ou d’une autre, Aftersun, sorti l’année dernière.
L’histoire d’une fille forte
Dès les premières minutes, la cinéaste nous entraîne dans un quotidien presque déjà acquis pour la jeune Géorgie. Sa mère décédée récemment, la jeune fille, laissée à elle-même, ne compte que sur son habilité à gagner sa vie en volant des vélos avec son ami Ali, gérer la maison ou encore faire croire à l’assistance sociale qu’elle vit avec son oncle. Dès lors, nous savons que face à nous, nous avons un personnage de caractère, malin, avec une éloquence assez mature pour son âge.
Du haut de ses 12 ans, Géorgie est à sa manière le reflet d’une jeunesse ouvrière londonienne, qui arrive à s’éduquer seule, à gérer ses émotions telle une adulte… Mais c’est jusqu’au jour où débarque, sans crier gare, un homme mystérieux, prétendant être son père, qui va bouleverser cette autarcie.
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Une nouvelle famille à hauteur d’enfant
Cette venue (retour) d’un jeune père tout aussi immature, va profondément bouleverser la vie de Géorgie. On ressent sans aucun mal le malaise de la jeune fille vis-à-vis de cet inconnu sorti de nulle part, après avoir abandonné sa défunte mère. Le film joue sur l’acceptation du deuil par deux êtres pas si matures que ça. L’une va se renfermer sur elle-même en gardant la face grâce à une rare vidéo de sa mère sur son téléphone, rappelant ces moments de joies désormais derrière elle. L’un va tout tenter pour renouer des liens (avec quelques difficultés) avec la fille qu’il a abandonné il y a des années.
Une comédie colorée et créative
La première chose qui marque dans Scrapper, c’est de loin sa narration. Grâce à son côté très enfantin et misant parfois sur l’exagération, il est intéressant de noter que le film est conté à hauteur d’enfant, précisément le point de vue de la jeune Géorgie. En effet, la réalisation joue sur l’imaginaire à travers une mise en scène créative et surtout bourrée de bonnes idées. On pensera également aux différentes connaissances de Géorgie qui interviennent de temps en temps à l’écran, sous la forme d’un confessionnal : ses camarades, son professeur, ses assistants sociaux… Bien que leurs interventions soient concises, ils offrent une authenticité, presque comique, au récit.
Avec des décors colorés et labyrinthiques, des cadres jonglant entre paysages linéaires et séquences en carton-pâte, Charlotte Regan ne fait pas vivre uniquement ses personnages, elle donne vie à leur imaginaire de façon naturelle et crédible, mais essentiellement, avec délicatesse. Là où Aftersun se concentre sur la fin d’une relation, Scrapper se concentre sur l’avenir d’une nouvelle relation. Celle de deux êtres qui se redécouvrent et mûrissent mutuellement.
Parfois drôle, imaginatif, mais surtout touchant, le film de Charlotte Regan est une comédie réconfortante. Harris Dickinson et Lola Campbell forment un duo doux et plein de tendresse, malgré leurs différends dans la première partie du film. Avec une mise en scène créative et pleine d’idées, Scrapper est un film vivant raconté à la première personne par sa protagoniste principale. Aussi délicat qu’Aftersun, il pourra en déstabiliser quelques-uns, certes, mais nous, il nous a charmés.
TITRE ORIGINAL : Scrapper
GENRE : Comédie, drame
TECHNIQUE : Prises de vues réelles
DURÉE : 1h24
PAYS : Royaume-Uni
DATE DE SORTIE FR : 10 janvier 2024
RÉALISATION : Charlotte Regan
AVEC : Harris Dickinson, Lola Campbell et Alin Uzun
PRODUCTION : DMC Film, BBC Film, British Film Institute (BFI) et Great Point Media
DISTRIBUTEUR FR : Star Invest Films France