Urban Nomad : Le point sur la 4ᵉ vague

Dans la volonté de recruter un nouveau lectorat, les deux géants du comics en France ont chacun lancé des opérations petits prix. Si Panini republie de courts arcs cultes de son catalogue Marvel assez régulièrement (collection à 7€) Urban opte pour la réédition en format plus petit (proche d’un manga légèrement augmenté) des récits cultes de son catalogue. Avec la collection Urban Nomad, DC, Vertigo, et titres d’autres maisons d’édition, le culte est dans la poche.

Urban Nomad, c’est quoi ?

Lancée il y a un an, la collection Nomad avait un atout sévère contre elle. Un format (presque) de poche qui réduisait considérablement la taille des dessins. Un argument que beaucoup, dont votre serviteur, dressait comme un étendard anti-nomad. Mais la qualité des récits, le suivi de celles-ci et la disponibilité fait que quasiment tous y ont succombé. Alors oui, les titres proposés sont ceux ayant bénéficié d’une belle durée de vie commerciale et sont rentables depuis longtemps. Mais à l’heure où tout augmente, voir des comics à petits prix fait un bien fou.

Car c’est bien là tout l’enjeu de ce format. Des comics à moins de 10€ pour les plus chers et volumineux, proposant des œuvres variées et permettant une belle offre. Et le genre super-héroïque n’est pas forcément le plus représentatif. Certes, nous aurons des titres de la firme à deux lettres (Batman: White Knight et Curse of the White Knight, Justice League New52, le merveilleux All Star Superman). Mais là où l’éditeur frappe un grand coup, c’est en reproposant des sagas cultes et en intégralité. C’est le cas du déjanté Transmetropolitan, du féerique Fable, de l’intrigant Y Le Dernier homme… Il y en a pour tous les goûts et à moindre coût.

Et le format de poche est finalement un argument très appréciable. Si pour des dessins comme ceux d’Alex Ross pour Kingdom Come le dessin réduit, le reste est très lisible et permet de se faire plaisir un peu partout. Transport en commun, plage, pause déjeuner… Ce petit format pourra vous accompagner partout.

Une publication régulière

Le 26 août 2022 était lancée la première vague de ce format. Pourquoi une vague ? Parce qu’avec une régularité métronomique, Urban nous offre tous les trois mois de nouveaux récits dans cette collection. Forte de plusieurs longues séries (Fables, Y The Last Man, Transmetropolitan, Justice League de Geoff JOHNS), chaque trimestre Urban nous fait la surprise de nouveaux tomes uniques dans cette collection. Des publications intelligentes dans le propos qui permettent de draguer quelques nouveaux lecteurs potentiels. Et les choix sont judicieux. Comme dit plus haut, Kingdom Come fait partie de ceux-là. Un choix pertinent tant on connaît l’amour des lecteurs français pour Alex Ross.

Et s’il est dommage que cette quatrième vague arrive à la fin de l’été, beaucoup de lecteurs attendaient ces sorties avec une belle hâte.


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De quoi est composée cette quatrième vague

Voilà le cœur du sujet. Dresser un tour d’horizon des dix titres programmés pour ce 23 août. Dix titres relativement différents dont la qualité n’est plus à prouver. Dans ces titres, nous trouverons trois récits Batman, 2 évent DC Comics et un titre issu des premières années de Urban. Quatre titres indépendants suivront le mouvement.


Batman: Année Un

Peut-être un des titres les plus cultes du personnage. Dans ce récit de 1987, Frank Miller profite de la relance DC Comics initiée par Crisis on Infinite Earths (voire ci-après) pour réécrire les origines de Batman. Attention, ce qui a été gravé dans le marbre par Bob Kane et Bill Finger dans les années 30 et 40 ne change pas. Les parents du jeune Bruce Wayne sont toujours tués sous ses yeux par Joe Chill. Ici le récit se concentre sur la première année de Bruce Wayne dans le costume de Batman. Un Batman maladroit, négligent et faillible qui l’emmènera sur la trace des mafieux de Gotham et le fera rencontrer le nouveau commissaire de la ville James Gordon.

Un récit culte accompagné de dessins qui peuvent cependant rebuter son monde. David Mazucchelli a un trait particulier auquel il s’est imposé une contrainte colorimétrique. En effet, seulement 64 d’entre elles sont utilisées pour donner vie à ses dessins. À noter que ce récit est suivi de l’histoire À La Vie, À La Mort de Tom King et Lee Weeks.

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Crisis on Infinite Earths

Urban Comics n’a tenté que très peu de sorties datant d’avant ce récit majeur. Pour cause, une refonte majeure de l’univers DC peut être au moins aussi importante que celle initiée par Julius Schwartz au crépuscule des 50’s. Dans ce récit, l’Anti-Monitor guide ses troupes d’univers en univers pour les détruire et se nourrir des énergies perdues. Son double “positif” forme alors une armée de Super-héros pour pouvoir l’arrêter. Mais cette armée n’est pas forcément suffisante.

Ce récit est culte pour plusieurs raisons. D’une part, le duo génial des 80s est à l’œuvre. Marv Wolfman et le regretté George Pérez nous livrent une histoire forte permettant de remettre un coup de propre dans les publications DC. Pérez brille par sa marque de fabrique sur ce titre : à savoir caser le plus de personnages possible dans ses vignettes. Et pour un récit qui a quasiment 40 ans, il n’a que peu vieillit. Deuxième raison : DC a besoin de remettre à plat tout son univers. Si la relance de Schwartz a lancé l’âge d’argent, les héros de l’âge d’or (années 30 à fin 40) sont toujours là. Plus compliqué, depuis l’épisode culte Flash of Two Worlds de septembre 1961, les héros de l’âge d’or, d’argent et ceux des maisons d’éditions acquises à travers les décennies par DC évoluent tous dans des univers parallèles. Certes cela a permis le multivers qui est maintenant indissociable des comics, mais c’était une énorme pagaille. Cet évent, un des tout premiers crossovers d’envergure, datant de 1985 permet de tout remettre à plat.

Un récit culte donc grâce à son histoire, mais aussi par sa valeur éditoriale, historique et culturelle. À posséder et avoir lu au moins une fois.

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Batman: Amère victoire

Suite directe de Batman: Un Long Halloween (récemment transposé à l’écran dans un double long métrage d’animation), ce récit suit donc Batman enquêter sur un nouveau tueur qui sème le doute sur l’identité de celui du précédent tome. (Vous suivez ?). Récit de 1999, il reprend là où Un Long Halloween avait laissé les choses. Batman doit jongler entre les “patients” d’Arkham qui prennent le pas sur les familles mafieuses dans la “gestion parallèle” de Gotham. Il aura fort à faire, mais il pourra compter dans sa quête de justice sur l’aide de son nouveau petit protégé : Dick Grayson.

Ce récit fait partie des incontournables de ceux sur Batman. Un récit dans lequel Loeb et Sale font encore une fois preuve d’un talent combiné qui frôle l’excellence. Les aplats de noir de Sale correspondant totalement au Caped Crusader. Un récit de type RetCon (Retro Continuité) qui garde encore ses lettres de noblesses malgré Flashpoint et son reboot de 2011. Un récit culte à lire.

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Batman & Les Tortues Ninja

Dans les histoires qui sortent de n’importe où, ce titre a une bonne place. Si DC, dans les années 90, s’est souvent allié à Dark Horse pour faire se rencontrer leurs licences (Superman / Madman, Batman VS Predator, Green Lantern VS Aliens…), c’est avec la célèbre franchise de la firme IDW que notre Chevalier Noir va s’associer. En enquêtant sur un meurtre ayant eu lieu à Gotham, Batman va rencontrer les chevaliers d’écailles (et de vinyyyyyles… pardon). Celles-ci avaient pris le Clan Foot en chasse. Il n’en faudra pas plus aux cinq héros pour s’associer et combattre les ninjas ensemble.

Un pitch accrocheur et décomplexé pour une dose de fun signé James Tynion IV et Freddie Williams II. Vu le duo, pourquoi se priver ?

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Blackest Night tome 2

Le choix peut être le moins pertinent de la gamme Urban Nomad. Deuxième partie du crossover Blackest Night qui découle directement du run de Geoff Johns sur Green Lantern. Un run disponible dans son intégralité (évent compris) dans les intégrales Geoff Johns Présente Green Lantern.

Nekron est devenu l’avatar de la mort. Un black lantern. Dans son obsession pour la mort, il ramène tous les défunts “à la vie” pour tuer tout le monde. Une grosse attaque de zombie qui se passe autant sur terre que sur toutes les planètes ou un lantern officie. Un choix surprenant, d’autant que cet évent ne permet pas de prendre la mesure du travail de Johns sur la série. Je conseillerai davantage les intégrales que ce tome.

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Justice League – tome 3

En 2011, DC relançait en quasi-totalité son univers. Un pari qui, même s’il a perdu des fidèles dans son audace, a permis de recruter de nouveaux lecteurs. Bien que la qualité de cette ère New52 soit discutable a posteriori, elle a laissé une marque forte dans l’esprit des lecteurs francophones. Et pour cause, Dargaud via sa nouvelle filiale créée pour l’occasion, récupérait les droits de distribution des comics DC à cette époque-là. Dans les titres phares du moment, on trouve donc Justice League. Le titre vitrine de DC qui permet au nouveau venu de se familiariser avec son univers. Pour ce tome, on reprend une menace bien connue des lecteurs de longue date, à savoir la ligue d’injustice. Cette arrivée permet à Lex Luthor de briller et de se faire accepter du public.

Si le récit est très classique pour les fidèles de DC, la narration de Johns permet de lui donner un certain panache. Même si ce n’est pas son meilleur travail, il a le mérite de donner une porte d’entrée solide dans l’univers DC. Un titre qui plaira davantage aux néophytes qu’aux connaisseurs.

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Fables – Tome 5

Tous les personnages de conte de fée se sont réfugiés à New York. À Fableville pour être précis. Tous, non. Certains se sont réfugiés à “La Ferme” : les moins humains d’entre eux. La raison de cette migration : l’invasion de leurs mondes par l’adversaire. Un être maléfique qui règne sur les mondes d’une main de fer.

Mais ce refuge n’est pas sans embûches. Entre les “Fable” qui se font trop remarquer par les communs et les conflits avec l’Adversaire, la gestion de Fableville par Prince Charmant, la tâche est rude. Épaulé par La Bête et sa Belle en tant que Shériff et gérante des affaires courantes, ils auront fort à faire pour gagner la confiance des Fables sans faire de vagues.

Fable, c’est un petit bonbon de fraîcheur. Titre aux multiples récompenses et auréolé d’une forte aura, on s’y plonge avec délice. Suivre les personnages que nous avons connus par les différents contes de fée, ou assimilés, évoluer dans un tout autre univers est un régal tant les histoires sont tour à tour touchantes, drôles, trépidantes… Une des meilleures séries Vertigo dont les auteurs britanniques ont repris l’écriture il y a plusieurs mois. À lire et relire.

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Transmetropolitan – tome 5

Warren Ellis. Un nom reconnu et admiré dans le milieu des comics. Il fait partie de cette deuxième vague de scénaristes britanniques recrutée par les Big Two (entre autres). Fin 90’s, il lance son chef-d’œuvre chez DC, déconnecté des super héros de la maison. Un pamphlet froid, cynique, corrosif, mais diablement drôle, sur notre société. Plus de 25 ans plus tard, sa critique violente est encore plus d’actualité. Identité de genre, flux migratoire, corruption des élites, nouveaux gourous… Tous les maux de notre société sont dépeints de façon dure par le scénariste dont le personnage principal de son œuvre pourrait LARGEMENT être une personnification de son point de vue.

Une lecture acide, drôle et engagée et pour public averti. Ce cinquième tome conclue une série dont on appréciera la relecture avec un sourire jaune au coin des lèvres. À lire et relire.

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Y The Last Man – Tome 4

Une épidémie inconnue a frappé la terre. Une épidémie d’un nouveau genre qui a éradiqué tous les mâles de chaque espèce sur terre. Tous non. Yorick et son petit singe, Esperluette, ont miraculeusement survécut. Voulant à tout prix retrouver sa petite amie, partie à l’autre bout du monde, il doit traverser une Amérique en pleine atmosphère post apocalypse, mais sans avoir vécu un cataclysme violent et visible, outre la disparition des mâles.

Comment une société peut se relever quand toutes les espèces manquent de mâles. Et comment un homme et son singe ont-ils pu survivre ? Si toutes les réponses ne sont pas données dans cette merveilleuse fable sociétale de Brian K. Vaughan, son récit nous offre un voyage plaisant à suivre. Un récit dans lequel chaque piste laissée par l’auteur semble en être une fausse. Qui plus est, une analyse sociopolitique fine et discrète est faite à travers l’œuvre. Une série qui prouve, si besoin en était, que Vaughan est un auteur talentueux. À lire.

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Punk Rock Jesus

Sean Gordon Murphy. Rien que ce nom est vendeur. Mais parler de musique punk, de catholicisme et de résurrection du Christ, que bon nombre de punk de la première et deuxième heure auraient adoré. Jésus n’est pas amour, mais Punk ! Et il en veut au monde entier.

Sous couvert d’un pitch aussi classique que vendeur, Sean Gordon Murphy nous dresse une critique acerbe de la société américaine actuelle. Mais aussi de la classe moyenne de notre temps. Biberonnée à la téléréalité et autre émission vendant du vide, l’Amérique (et l’occident par extension) est devenu fainéant. Alors quoi de mieux que de ressusciter Jésus et d’en faire un punk qui va cracher sa haine sur cette culture qui n’en a que le nom ?

Dessiné et scénarisé par l’auteur de Batman White Knight, ce tome est une petite curiosité acide qui, pour le prix, vaut le détour.

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BILAN DE CETTE QUATRIEME VAGUE

Vous vous en doutez si vous êtes arrivé jusque-là. Cette quatrième vague est encore un très bon cru. En dehors de deux tomes qui ne seront pas les plus prisés des amateurs de cette partie du neuvième art, le tout est très bon. Alors certes, les lecteurs de plus longue date auront quasiment tout ce qui sort. Mais il est plaisant de voir ces titres prisés par les amateurs de BD américaine offerts au plus grand public avec un prix bien plus attractif. Pour les moins curieux, vous pouvez vous lancer sur Batman Année un, Batman & Les Tortues Ninja ou Punk Rock Jesus. Mais ce ne serait pas honnête de ne pas vous recommander les trois séries indépendantes qui se voient être pérennisées dans cette collection. À savoir Fables, Y Le Dernier Homme ou Transmetropolitan.

Konata Nekoyama aime

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